Ce qu’on entend par sanisme dans la sphère antipsy et pourquoi on utilise ce terme plutôt que psychophobie (un petit mot sur psyvalidisme).
Pourquoi ne pas utiliser psychophobie ?
Déjà, on l’a utilisé pendant un moment, c’est un fait. Et il a été utile, son apparition est déjà une avancée en soi. Aujourd’hui, on reconnaît plus qu’il y a une peur/un rejet/une dévalorisation des personnes psychiatriséEs ou perçue comme telle. Mais il n’est pas suffisant et il a été récupéré.
Il pointe la stigmatisation de fait de manière très individuelle, et cela encore plus depuis qu’il est brandi par les soignantEs du secteur psy. Il se limite souvent à des discours du type « il faut que les gens soient plus gentils avec les malades psy / iels sont pas un danger, surtout s’iels prennent leurs médocs ». C’est parce qu’il s’inscrit dans l’approche de la « déstigmatisation » dans laquelle l’analyse ne va pas plus loin et l’ambition c’est juste de lutter contre la mauvaise image auprès du public général en faisant mieux connaître la vie des personnes à coup de témoignages (de personnes jugées comme des bons patients de la psychiatrie souvent), les vraies statistiques sur les violences, en informant sur les maladies mentales et en disant que c’est pas grave d’être un malade mental. Les gens auraient juste mal compris.((Un très bon article sur la « déstigmatisation » ici))
Je trouve d’ailleurs que c’est un problème assez récurent avec le suffixe « phobie », je trouve souvent son utilisation dans les luttes limitée, et cet article résume bien pourquoi (sur le terme « transphobe »).
Sur la récupération, je veux parler du fait que la psy, les soignantEs ou les personnes qui s’inscrivent dans cette approche pro-psy (dont des psychiatriséEs) n’ont pas du tout vu dans « psychophobie » de critique de la psychiatrie. Il n’y a aucune réflexion dans leur approche sur l’origine de la stigmatisation, de questionnement sur ce qu’est la folie/les maladies mentales, du rôle de contrôle social de la psychiatrie etc.
Et on va jusqu’à nous dire que la psychiatrie souffre de la psychophobie, que c’est à cause d’elle que la psychiatrie n’a pas assez de moyens.
Pourquoi « sanisme » ?
L’objectif est de montrer que tout ça s’inscrit dans un contexte beaucoup plus large, plus politique. Le « -isme » permet de montrer ça. Mais surtout le « san » c’est pour sain, l’idée d’un esprit sain. Le discours antipsy s’attache beaucoup à montrer la construction de cette norme saine. Donc, en résumé, que oui les fols sont stigmatiséEs mais que la folie est une construction sociale, une notion fluctuante (que la psy veut la cacher derrière le terme « maladie mentale » maintenant, prétendant faire une rupture avec la folie mais c’est la même chose) et que l’institution psychiatrique est à l’origine de cette norme, qu’elle l’impose, la reproduit, fait le boulot de trie. Que la psychiatrie est un instrument de contrôle et coercition qui désigne comme fols une partie des déviantEs, derrière une apparence de légitimité médicale.
C’est un outil des dominants et de l’Etat, au service du racisme, de l’hétérocispatriarcat… ((je vais pas rentrer dans toute la démonstration ici, allez lire cette intro de Zinzin Zine et le reste du site pour tout un tas de développement))